Elle est arrivée à la fin du printemps. J’ignore la date précise ; je sais seulement que les tilleuls de l’avenue embaumaient déjà, le premier soir qu’elle a passé chez nous.

Chez nous ! C’est beaucoup dire, pour moi qui ne suis chez personne vraiment. Mais, en dépit de tout, des liens me rattachent à cette ville, à cause des années difficiles que j’y ai vécues, poursuivant, sans jamais m’interrompre, avec la patience des archivistes et  des bibliothécaires égarés dans le dédale des rayonnages, les chimères du souvenir. Et d’ailleurs, que fais-je encore aujourd’hui, en commençant ce récit incertain, sinon pourchasser des leurres, des fantômes de carton ?

  - 1994 -